Pleins feux sur la ville

Comment Chennai restaure le lac Kadapakkam grâce à des solutions basées sur la nature

Un coup de projecteur d'UrbanShift sur la gestion intégrée de l'eau, l'adaptation au climat et l'innovation locale

Lac de Chennai

Ce blog a été écrit par M. Matteo Bizzotto (Senior Officer, Global Communications, ICLEI World Secretariat), avec des contributions de M. A S Murugan (Superintending Engineer, Storm Water Drain Department, Greater Chennai Corporation) et Dr. M. Nisha Priya (Sustainable Cities Specialist cum Project Coordinator ( ADB- GEF) - Storm Water Drain Department, Greater Chennai Corporation, Chennai).

La Greater Chennai Corporation (GCC), la plus ancienne municipalité de l'Inde, gère un paysage urbain tentaculaire et densément peuplé où la résilience climatique n'est pas seulement un objectif, mais une nécessité. Avec une grande partie de la ville située à peine à deux mètres au-dessus du niveau de la mer et confrontée à des pluies de mousson intenses, Chennai est extrêmement vulnérable aux inondations et aux sécheresses. En réponse, la ville s'est tournée vers un allié puissant : la nature elle-même.

Dans le cadre du programme UrbanShift Chennai fait progresser la restauration du lac Kadapakkam dans le nord de Chennai, une initiative qui allie une collaboration à plusieurs niveaux, des solutions basées sur la nature et une planification urbaine inclusive.

La nature en tant qu'infrastructure

La restauration du lac Kadapakkam est plus qu'un projet d'embellissement ; il s'agit d'une stratégie ancrée dans la science, la tradition et la nécessité. Autrefois envahi par les mauvaises herbes et la vase, le lac est en train d'être dragué et approfondi pour améliorer la rétention de l'eau, réduire les risques d'inondation et fournir des services écosystémiques tout au long de l'année.

Le projet, soutenu par la Banque asiatique de développement (BAD) et une subvention de 6,88 millions de dollars du Global Environment Facility GEF, est un modèle de la manière dont les solutions basées sur la nature peuvent servir des objectifs climatiques multiples. Au-delà de l'atténuation des inondations, le lac est réaménagé pour favoriser la biodiversité, la sensibilisation à l'éducation et les loisirs communautaires, en particulier pour des groupes tels que les femmes, les enfants et les personnes handicapées.

La géographie de Chennai explique cette importance. Avec sa topographie plate et son exposition côtière, les eaux pluviales n'ont nulle part où aller lors de pluies intenses. Mais les plans d'eau restaurés comme le lac Kadapakkam agissent comme des éponges urbaines, absorbant l'excès d'eau pendant les tempêtes et rechargeant les nappes phréatiques pendant les périodes sèches. Dans le cadre de son plan de gestion intégrée des inondations urbaines pour le bassin de la rivière Kosasthalaiyar, la ville a déjà restauré plus de 210 lacs et étangs de ce type.

La collaboration dès la conception

La renaissance du lac Kadapakkam est un cas d'école de gouvernance à plusieurs niveaux. La Greater Chennai Corporation est à la barre et travaille en coordination avec le département de l'administration municipale et de l'approvisionnement en eau, le département des affaires économiques, la BAsD et le GEF. Le département des ressources en eau s'occupe du volet drainage, tandis que les ONG locales, les groupes industriels et les membres de la communauté apportent leurs connaissances et leur soutien.

Première réunion du comité de gestion des lacs avec des experts en la matière et d'autres acteurs clés.

Première réunion du comité de gestion du lac (février 2025) avec des experts en la matière et d'autres acteurs clés, notamment des agences gouvernementales, des agriculteurs locaux, des industriels et des ONG. Crédit photo : Greater Chennai Corporation.

Un comité formel de gestion du lac garantit que les experts environnementaux, les hydrologues et les représentants des citoyens ont tous un siège à la table. Cette approche participative permet non seulement d'améliorer les résultats techniques, mais aussi de renforcer l'appropriation de l'espace par le public.

Et les bénéfices sont tangibles : Les résidents locaux ont été employés à des tâches telles que le désherbage, l'aménagement paysager et l'installation de l'éclairage solaire, créant ainsi un vivier d'emplois verts à long terme dans le domaine de la maintenance et de la gestion communautaire.

En outre, l'engagement de Chennai dans le programme UrbanShift a joué un rôle important dans l'élaboration de sa stratégie. Des fonctionnaires de la ville ont participé à de nombreux forums de partage des connaissances, dont le ForumUrbanShift Asie en 2023 et la Académie des villes régionales en Indonésie en 2024. Ces plateformes ont mis en lumière les meilleures pratiques en matière d'adaptation au climat et montré comment d'autres villes tirent parti de solutions fondées sur la nature et d'un financement durable.

Selon le département des eaux pluviales de Chennai, ces échanges ont renforcé les plans existants de la ville tout en la poussant à systématiser les leçons tirées de l'expérience, à développer les infrastructures "bleu-vert" et à explorer des mécanismes de financement novateurs.

Rendre l'adaptation visible, inclusive et mesurable

La vision ne s'arrête pas au lac Kadapakkam. Les restaurations des lacs de Chennai sont conçues comme des modèles reproductibles de solutions basées sur la nature, susceptibles d'attirer des financements verts et de guider d'autres villes. Dans le cadre du projet actuel, la ville indienne de Madurai a déjà été sélectionnée comme site de reproduction. Les objectifs à long terme consistent à étendre l'infrastructure verte et bleue de Chennai, à documenter les réussites et à partager les enseignements au niveau national et international.

L'accent n'est pas seulement mis sur les mesures climatiques. Les masses d'eau restaurées offrent des avantages sociaux essentiels, tels que des allées ombragées, des jardins communautaires, des poches de biodiversité et des salles de classe en plein air qui enseignent la gestion de l'environnement.

Pour les villes qui espèrent suivre l'exemple de Chennai, le message est clair : les solutions basées sur la nature fonctionnent mieux lorsqu'elles sont intégrées dès le départ. Chennai a souligné l'importance de définir des contrats clairs avec des résultats mesurables, d'impliquer les différentes parties prenantes de manière significative et d'aligner les projets sur des opportunités de financement vert plus larges.

Le parcours de la ville, de la vulnérabilité aux inondations à la résilience verte, n'est pas encore achevé. Mais le lac Kadapakkam raconte déjà une histoire passionnante : Lorsque les villes traitent la nature comme une infrastructure et impliquent les habitants dans le processus, elles renforcent la résilience climatique, la confiance du public et l'emploi.